Homélie retranscrite à partir d’un enregistrement
Chers Amis,
L’attitude de cette femme est très étonnante. Nous pourrions dire que celle de Jésus à son égard l’est tout autant : il aurait pu la rejeter, ils sont à table tout de même !
Dans l’Évangile, ce qui est marquant, ce sont les gestes que la femme accomplit à l’égard de Jésus. Elle ne prononce pas un mot, mais ses gestes en disent long sur son amour et sur sa foi en Jésus. Jésus en est d’ailleurs touché et a su tout de suite reconnaître ce qu’elle portait vraiment dans son cœur, comme il le dit à celui qu’il avait invité : « Ses péchés, ses nombreux péchés, sont pardonnés, puisqu’elle a montré beaucoup d’amour. » Tout est changé pour elle ! « Tes péchés sont pardonnés. » « Ta foi t’a sauvée. Va en paix ! »
Nous pouvons tous nous reconnaître dans la démarche de cette femme. Nous voici à Lourdes avec tout ce que nous sommes, le beau et le moins beau. Nous sommes tous pécheurs, même si cela se manifeste de façon très différente dans l’histoire et la situation de chacun d’entre nous, sans doute à des degrés divers, mais personne ne peut se croire supérieur aux autres, surtout dans cette grotte, aux pieds de Marie.
Devant l’amour du Christ que la Vierge nous révèle, nous sommes démasqués intérieurement, à défaut de l’être extérieurement, et nous aussi nous accomplissons des gestes d’amour et de foi à l’égard de Jésus, des gestes d’humilité et même d’humiliation, comme la femme de l’Évangile. Déjà en faisant la démarche de venir en pèlerinage à Lourdes, de déposer un cierge, de faire le geste de l’eau comme la Vierge Marie l’avait demandé à Bernadette : « Venez boire à la source et vous laver en signe de pénitence. »
Nous ne pouvons pas actuellement toucher le rocher de la grotte, mais le fait de venir nous recueillir en ce lieu est aussi un geste d’amour. D’autres gestes, ce que l’on appelle la dévotion populaire, rejoignent les gestes de la femme pécheresse qui vient manifester son amour et sa foi.
Souvenons-nous de ce que Bernadette avait dit à propos de la Vierge Marie : « Elle m’a regardée comme une personne. » Dans l’Évangile, celle que le pharisien appelle « la pécheresse », Jésus, lui l’appelle « la femme ». Il en parle en bien, dans sa dignité, jusqu’à s’adresser directement à elle : « Ta foi t’a sauvée. Va en paix ! ». À travers notre démarche de pèlerins, le Seigneur est témoin de notre amour pour Lui et cela change de nombreuses choses dans notre vie. Cette Parole, « Ta foi t’a sauvée. Va en paix ! » Jésus nous l’adresse aussi, et dans cette période d’incertitudes, elle retentit en nous de façon bien particulière. De fait, nous vivons actuellement une période incertaine : incertitude par rapport à la COVID-19 (jusqu’à quand allons-nous être sous la menace de cette maladie, limités dans nos relations, nos déplacements, nos liturgies ?), incertitude par rapport à l’économie, par rapport à nos emplois. À ces incertitudes, s’ajoute celle de l’avenir de notre planète : le réchauffement climatique, la pollution, la diminution des ressources. Je n’allonge pas la liste… les médias nous en parlent à longueur de journée… mais, face à ces incertitudes, Jésus, lui, nous donne une certitude : « Ta foi t’a sauvée. » Il ne nous dispense pas des défis que nous avons à surmonter en solidarité avec l’humanité entière et lui-même est allé jusqu’à mourir sur une croix, mais nous savons que nous sommes sauvés, car Jésus a vaincu le mal et la mort comme nous le rappelle Saint-Paul dans la première lecture. Nous croyons qu’il reviendra dans la gloire et que dès maintenant il nous fait entrer dans une vie nouvelle, une vie qui n’aura pas de fin : dans SA vie ! « Va en paix ! » nous dit Jésus, n’aie pas peur de tout ce qui se passe et reste fidèle dans ton amour et dans ta foi.
Comme nous sommes rassemblés ici devant la grotte, confions-nous à la Vierge Marie, confions nos familles, nos amis, notre diocèse : « Comme le Père vous a choisi, ô, Marie, pour être son enfant immaculée, l’épouse de Joseph et la mère de son fils bien-aimé, et de toute l’Église, dans une communion plénière à l’Esprit Saint, nous vous choisissons aujourd’hui comme Mère et Reine et nous vous consacrons notre âme et notre corps, toutes nos activités et tout ce qui nous appartient sans exception. Exercez sur chacun de nous votre miséricorde la plus maternelle. Apprenez-nous à aimer toujours plus Jésus et le Père, et par eux à nous aimer les uns les autres dans l’Esprit Saint en nous découvrant toujours plus profondément dans la lumière de Jésus, en nous respectant mutuellement et en nous choisissant chaque jour dans un amour plus divin et plus simple. Ô, Marie, donnez à chacun de nous d’accomplir chaque jour dans un don personnel la volonté du Père, pour qu’avec toute l’Église, nous témoignions au milieu du monde de l’amour de Jésus victorieux du mal[1] ». Amen
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon
[1] Inspirée de la Prière de Consécration. Site Internet des Frères de St Jean.